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26 novembre 2020 4 26 /11 /novembre /2020 10:40
Maison des bois . Henri Pourrat

Le jour coule verdi de l'antique fenêtre

Au court montant de bois traversé de barreaux;

Elle est tout en largeur et ses petits carreaux

Ne laissent voir dehors que la feuille des hêtres 

 

C'est le royaume du silence au bois dormant 

A peine si le geai vient y piquer la faine.

Nul bruit en la maison que de l'horologe à grain 

Entre le coffre à sel et les sacs de froment. 

 

Dans le fond embruni de cette salle basse,

Luisant comme la lune, alors que dans son plein

Elle sort sur la côte à l'heure du serein, 

Le balancier de cuivre rond passe et repasse. 

 

Séjour sauvage, mais d'une verte gaité, 

Car l'air a dans ces monts un arôme de sauge, 

Et les heures ici comptées de mon horloge

Sont heures de ma volonté. 

 

Henri Pourrat 

Maison des bois . Henri Pourrat
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23 novembre 2020 1 23 /11 /novembre /2020 08:57
Le vent de la montagne. Henri Pourrat

Le vent qui souffle à travers la montagne

Me rendra fou.

Je veux partir, je veux prendre la porte, 

Je veux aller

Là où ce vent n'a plus de feuilles mortes, 

A râteler.

Plus haut que l'ombre aux vieilles salles basses

Où le feu roux

Pour la veillée éclaire des mains lasses

Sur les genoux; 

Aller plus haut que le col et l'auberge

Que ces cantons

Où la pastoure à la cape de serge 

Paît ses moutons; 

Que les sentiers où chargés de deux bannes, 

Sous les fayards,

Le mulet grimpe au gris des feux de fanes

Faisant brouillard.

Ce vent me prend, me pousse par l'épaule, 

Me met dehors, 

La tête en l'air, le coeur à la venvole, 

Le diable au corps.

Il faut partir et prendre la campagne

En loup-garou:

Le vent qui souffle à travers la montagne 

Me rendra fou. 

Henri Pourrat 

Sinon dans sa jeunesse , Henri Pourrat a écrit et publié peu de poèmes . Celui-ci , à l'évidence, lui a été inspiré par les deux célèbres vers " Le vent qui vient à travers la montagne/ Me rendra fou" extraits du poème " Gastibelza de Victor Hugo 

Le vent de la montagne. Henri Pourrat
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23 novembre 2020 1 23 /11 /novembre /2020 08:45
Les poètes . Aragon

Je ne sais ce qui me possède 

Et me pousse à dire à voix haute 

Ni pour la pitié ni pour l'aide

Ni comme on avouerait ses fautes 

Ce qui m'habite et qui m'obsède 

 

Celui qui chante se torture 

Quels cris en moi quel animal

Je tue ou quelle créature 

Au nom du bien au nom du mal 

Seuls le savent ceux qui se rurent

 

Machado dort à Collioure 

Trois pas suffirent hors d'Espagne

Que le ciel pour lui se fit lourd 

Il s'assit dans cette campagne 

Et ferma les yeux pur toujours

 

Au dessus des eaux et des plaines 

Au dessus des toits des collines 

Un plain chant monte à gorge pleine

Est-ce vers l'étoile Holderlin 

Est-ce vers l'étoile Verlaine 

 

Marlowe il te faut la taverne 

Non pour faust mais pour y mourir 

Entre les tueurs qui te cernent 

De leurs poignards et de leurs rires 

A la lueur d'une lanterne 

 

Etoiles poussière de flammes

En Aout qui tombez sur le sol

Tout le ciel cette nuit proclame 

L'hécatombe des rossignols 

Mais que sait l'univers du drame 

 

La souffrance enfante les songes 

Comme une ruche ses abeilles 

L'homme crie où son fer ronge 

Et sa plaie engendre un soleil 

Plus beaux que les anciens mensonges 

 

Je ne sais ce qui m'obsède 

Et me pousse à dire à voix haute 

Ni pour la pitié ni pour l'aide 

Ni comme on avouerait ses fautes 

Ce qui m'habite et qui m'obsède .

 

 

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21 novembre 2020 6 21 /11 /novembre /2020 10:11
Les poètes assassinés. Henri Gougaud

Entre les dents des jours une rose scintille 

dans Prague aux doigts de pluie Nezval disait cela 

c'était en mil neuf centre trente-six en ce temps-là

Nazum Hikmet l'homme d'Orient cheveux jonquille 

à Istamboul entrait pour trente ans en prison

Lorca perdait son sang cornes de lune au front 

et Desnos deuil pour deuil comme un taureau très doux 

veillait au Pont-au-change et pressentait les loups 

 

Entre les dents des jours une rose scintille 

dans Prague aux doigts de pluie Nezval disait cela 

 

Et Miguel Hernandez au bagne d'Alicante 

baisait les souliers vides et les morts sur les yeux

nous n"appartenons pas à un peuple de boeufs 

disait-il il chantait des splendeurs innocentes 

il chantait pour son fils mort de faim à dix mois 

et sur le sang rouillé vent du peuple sa voix 

fut la rose aux cent feuilles à la cime des monts 

qui t'appelait avec orgueil Révolution 

 

Entre les dents des jours une rose scintille 

dans Prague aux doigts de pluie Nezval disait cela 

 

Un jour quand sera sec et stérile le ventre 

énorme des fascismes un autre temps viendra 

et reviendront les morts qui ne pourrissent pas 

ils descendront du train ils secoueront la cendre 

de leurs vieux vêtements démodés un matin 

ils pleureront de joie dans des gerbes de mains 

parmi les travailleurs à l'aube juste éclose 

avec dans leur poing bleu le soleil vertical 

 

Entre les dents des jours scintillera la rose 

dans Prague aux doigts de pluie où chantera Neval . 

 

Extrait de Souvenirs invivables 

Editions Ipomée 

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20 novembre 2020 5 20 /11 /novembre /2020 08:55
La sève .Jacques Viallebesset

L'esprit de la sève donne sens au mystère

De toute vie dans sa poussée vigoureuse

C'est bien la même eau qui roule dans mes veines

Comme le sang de la terre coule aux fontaines

 

La fleur prend son élan caché vers la lumière

Son chiffre et la forme du fruit sont issus

Des semblables particules élémentaires

De l'infini fourmillant d'astres à la terre

 

L'arbre est déjà entier dans le brin d'herbe vert

Qui pousse droit pour demain répondre au soleil

Au même pays tous les chemins du monde mènent

Sous l'écorce drue des hautes futaies humaines

 

Le torrent dévale comme s'il était l'artère

Où martèle en secret le pouls de la vie

De l'atome au cosmos la nature est une

Qui nous tient debout entre soleil et lune .

 

JV

Extrait de Le plain-chant des hautes terres 

Claude Legrand-Jacques Viallebesset

éditions Le nouvel athanor

disponible en librairie et sur le site de l'éditeur

www.lenoouvelathanor.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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11 novembre 2020 3 11 /11 /novembre /2020 15:36
Un feu secret. Jacques Viallebesset

Est-on un jour assez nu sous tous les masques

Pour atteindre tout au fond de soi et de l’autre

Le doux noyau commun de la fraternité

L’espérance est un fragile brin d’herbe verte

 

Tant qu’il y a de l’eau pour dévaler des monts

La vie souveraine  coule des lèvres mouillées

Et derrière elle portant le rêve des hommes

Se lève l’espoir éternel de l’amitié

 

La terre tourne  la vie roule inexorablement

Les lointains d’un bleu d’argent mangés de lumière

Elargissent  la vie qui bouillonne au cœur

Et jaillit dans un regard brillant de ferveur

 

Ma  seule sœur des rendez-vous d’amour manqués

Il n’est pas bien tard avant que vienne  le soir

Nous lèverons encore vers le côté du jour

Nos verres à la rencontre du premier rayon .

 

Et la vie reprendra son goût et sa chaleur

Car un  feu secret veille qui ne veut s’endormir

Et qui attend rougeoyant au fond de nos cœurs

Jusqu’à ce que la nuit définitive tombe .

 

Poème inédit.

Tous droits réservés 

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11 novembre 2020 3 11 /11 /novembre /2020 11:41
Le grand troupeau. Jacques Viallebesset

J'ai vingt-deux ans et j'ai très peur de mourir 

Dans la boue mêlée du sang des bêtes et des hommes 

Leurs yeux vitreux luisent comme ceux des moutons 

Dans le grand troupeau de cette folle boucherie 

 

Sous le brasillement d'étoiles qui remplit le ciel 

Ils sont des milliers qui roulent comme un ruisseau 

Derrière le bélier dans la verte fraîcheur moussue 

Chant éternel et vivant de la terre au cosmos 

 

Le temps est figé dans l'attente et l'angoisse 

Le monde est rétréci à cinq mètres de soi 

Au-delà le pays mystérieux d'où vient la mort 

L'aube se lève toujours sur des ruines horrifiées 

 

Au pays on allait au verger faire la sieste dans le foin 

Je la revois toute chaude avec ses mains à caresses

Qui passait ses doigts dans l'épaisseur de mes cheveux 

Et j'ai cette grande faim dont elle est le pain

 

Je veille dans la plaie d'un éclatement de mines 

Avec des cadavres entassés comme parapet 

Une mitrailleuse rythme ma sourde inquiétude 

J'entends l'agonie lente d'un blessé entre  les lignes 

 

Mon amour il faut que je te dise ce que j'ai fait 

J'ai levé haut ma main à dix mètres et il a tiré 

Comme le renard se ronge pour briser le piège 

Il me reste une main douce pour te caresser . 

 

Extrait de Sous l'étoile de Giono

Editions Alain Gorius-Al manar 

disponible sur www.editmanar.com 

 

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11 octobre 2020 7 11 /10 /octobre /2020 09:23
Tableau de Claude Legrand

Tableau de Claude Legrand

Ô vieilles pluies souvenez-vous d'Augustin Meaulnes

Qui pénétrait en coup de vent

Et comme un prince dans l'école

A la limite des féeries et des marais.

En un pays mené de biais par les averses

Et meutri dans son coeur par le fouet des rouliers

Le lit défait du garde-chasse

Les chemins creux du monde entier

C'est là que je t'attends c'est là qe je te veille

Printemps comme un chanteur des rues printemps pareil

A la petite lumière d'un vélo sur la route

Voici que le plus simple d'entre nous s'émerveille

D'avoir entre les mains un bouquet de jonquilles

Et l'oiseau qui dormait encore se souvient

D'une fenêtre au bout du monde

Peut-être que là-bas dans les terres perdues

Une jeune fille de famille toute nue

Se dresse à la croisée ouverte et se regarde

Dans un morceau de lune triste comme un parc

 

Peut-être bien que c'est ainsi dans les romans

Une grosse cloche avec le printemps dedans

Mon amour tu es là comme une herbe qui penche

Sa longue écriture douce sur la page

Et je lis dans tes yeux et tu peux bien baisser

Ta paupière comme du genêt mouillé

J'épelle comme un enfant qui dort

La chaude et mesurée syllabe de ton corps.

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11 octobre 2020 7 11 /10 /octobre /2020 09:15
Dans la marge 7. Jacques Viallebesset

J'aurais voulu être celui-là qui vient

Porteur d'une joie d'être à partager

Avec tous les humains qui saignent

De leurs rêves lourds d'espoirs blessés

Je porte en moi les sucs de la terre

La danse de flamme du sang au coeur

Ma poitrine se gonfle du vent des astres

J"halète de la sève de tout ce qui vibre

Frémit palpite et vit au rythme des saisons

 

Je voudrais être celui qui vient

Un arc en ciel doux dans les tempêtes

Un magma de joie monte de mon ventre

Je t'ai retrouvée et te tresse dans mes bras

Tes yeux font chanter toutes les sources

La joie est là bruissant dans ton feuillage

Bourgeon tendre gorgé de résine vivante

Tu es en moi comme le noyau dans son fruit

Ma joie ne demeurera que si elle est tienne.

 

Extrait de Sous l'étoile de Giono.

Editions Alain Gorius-Al Manar

disponible sur www.editmanar.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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8 octobre 2020 4 08 /10 /octobre /2020 08:48
Le temps de dire. Jacques Viallebesset

                                                                         

Le monde naît de la parole

Mais les mots sont en exil

A ramasser sur la terre fertile

A partager de main en main

Ardents à rallumer les braises

 

Seul le chant de la flûte fascine l’oiseau

Dont les trilles se font piéger sur la page

 

Je suis l’humble serviteur

De cette  parole à venir

En arpentant l’imaginaire

Je défriche vos silences

De ce coté-là de la rive

 

J’écris entre les lignes d’un horizon vide

Pour rendre saveur drue et sève à la vie

 

Entre déjà là et pas encore

C’est toujours le temps de dire

Avant la porte ultime du destin

Que l’ondée fertile des mots

Fasse reculer la mort lente

 

Si les poèmes se dissipent en fumée bleue

Qu’ils emportent ma mémoire en bagage .

 

inédit; tous droits réservés 

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Présentation

  • : L'atelier des Poètes - par Jacques Viallebesset
  • : VIVRE POETIQUEMENT, L'AMOUR VRAI, LA JOIE D'ETRE sont les trois facettes d'une seule et même chose qui se nomme: ETRE et ne pas seulement exister. Lorsqu'on vit poétiquement, forcément, ça laisse des traces....
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